En 1940, le soldat du 16e régiment de ligne H32, matricule 10881482, se bat sur le canal Albert.
Il participe à la campagne des 18 jours et est fait prisonnier sur la Lys le 28 mai.
Il est envoyé en Allemagne où il est mis au travail dans les usines d’armement de Schweinfurt et de Nuremberg.
Fernand Renders est installé au Stalag XI 16 arb kd 04497 dans des conditions difficiles à imaginer.
Il est logé dans le froid des baraquements en bois et en tôle; souvent, il a le ventre creux et doit supporter l’effroi des bombardements. Il est loin de chez lui et, souvent, sans nouvelles du pays.
En 1945, il est rapatrié depuis Linz en Autriche. Malade, il avait été placé dans une ferme où il fut soigné et bien traité. C’est la Croix-Rouge française qui, par avion, le dépose près de Valenciennes dans le Nord de la France. II est placé dans un train qui, via Mons, Haine-Saint-Pierre, Baulers, le ramène à Bousval.
A Bousval, pour de nombreuses familles, c’était l’attente angoissante d’un retour ! Beaucoup sont revenus, d’autres pas. La joie pour certains, la tristesse et la consternation pour d’autres, ou, pire encore, le silence total.
Mon père se faisait attendre, des rumeurs concernant sa mort planaient !
Enfin, à la veille des fêtes de la Pentecôte, … l’annonce de son retour nous parvient par une Bousvalienne, Andrée Polet-Vallons (1), avertie par téléphone depuis la gare de Haine-Saint-Pierre : son arrivée est imminente !
On demande à Andrée d’avertir la famille. Pourquoi Andrée ? Tout simplement parce qu’elle était raccordée au téléphone, chose assez rare à cette époque.
Ce jour-là, le 18 mai 1945, emmenées par Georges Hauchart, notre instituteur, plusieurs classes des écoles communales de Bousval se rendaient à la cité de Noirhat, un bouquet de lilas à la main, chez un prisonnier de retour chez lui : Eugène Scarnière.
A Bousval, il était habituel de rendre visite avec sa classe au prisonnier qui rentrait de captivité.
Après avoir averti maman, Andrée Polet est venue nous rejoindre au petit passage à niveau piétonnier du chemin de fer, devant la boutique de vélos de Ferdinand Courrouppe (2).
Elle annonce donc la bonne nouvelle aux deux filles, Danièle et Gisèle, âgées respectivement de 7 et 8 ans. Et nous voilà quittant le groupe d’élèves et rejoignant maman en courant et chantant « notre papa revient, notre papa revient ».
A la maison, maman, bobonne (Rosine Piron-Gérard ) et les voisins s’affairaient à préparer l’événement. Les uns riaient, d’autres pleuraient de joie.
Vers 18 h, accompagnés du bourgmestre Jean-Baptiste Breuer, de nos voisins et amis, nous l’attendions tous sur le quai de la station de Bousval. Le chef de gare Jules Petit nous confirma qu’il y avait bien un prisonnier dans le train au départ de Baulers.
Moment d’intense émotion, à l’arrivée du convoi.
Un soldat en uniforme, coiffé d’un calot dont la floche rouge lui retombait sur le visage se tenait sur le marchepied.
Pâle d’émotion, ne pouvant articuler aucun son.
C’était indescriptible de le voir là après une si longue absence.
Pour ma part j’étais partagée entre la joie et l’incertitude.
En effet, c’était la première fois que je le voyais !
J’étais trop petite à son départ pour me souvenir de lui.
Après les retrouvailles, nous sommes rentrés à pied à la maison où nous attendait Rosine.
C’est elle qui, en 1935, engagea et logea mes parents, jeunes mariés, dans la forge Mathy (3) en échange de travaux ménagers.
Rosine était sans enfants et handicapée. A notre naissance, elle émit le souhait de devenir notre bobonne.
La guerre tissa entre nous des liens indestructibles. Toute notre enfance fut bercée par sa tendresse infinie. Elle restera à jamais gravée dans nos cœurs.
Après son retour, papa dut subir plusieurs opérations dont une assez sérieuse ; il fut mis en congé de maladie jusqu’au 1er janvier 1946. Par la suite, il réintégra les usines Émile Henricot à Court-Saint-Étienne où il effectua des travaux légers.
Il s’est éteint pendant sa sieste à l’âge de 72 ans en 1985.
Source : Gisèle Renders, Le Bousvalien 05/2005.
(1) Voir note de son décès dans le Bousvalien de janvier 2005. Une correction : son mari, Gustave Vallons, est mort en 1995 et non en 1975 (ceux qui l’ont connu auront corrigé mentalement)
(2) Actuellement avenue des Combattants, n° 125-127
(3) Actuellement rue du Château, n° 59